Publié le mercredi, 11 mars 2009 à 16h09
La solitude des nombres premiers de Paolo Giordano
Qu’ont-ils en commun Alice et Mattia ? Pas grand-chose mis à part un « accident » qu’ils ont eu dans leur enfance et qui a changé à jamais le cours de leur vie. Alice et Mattia n’auront pas une vie comme les autres. C’est peut-être cette incapacité de vivre comme le reste du monde qui les attire. Mais est-ce vraiment l’accident qui a déterminé leur attitude ?
En lisant les deux premiers chapitres, le lecteur peut avoir l’impression qu’il s’agisse d’un recueil de nouvelles. Les deux premiers chapitres sont en effet totalement indépendants et séparés, comme d’ailleurs les deux protagonistes. Mais aussi comme les nombres premiers. Les nombres premiers ne sont divisibles que par 1 et par eux-mêmes. Ils occupent leur place dans la série infinie des nombres naturels, écrasés comme les autres entre deux semblables, mais à un pas de distance. Ce sont des nombres soupçonneux et solitaires.
Mattia deviendra un grand mathématicien. C’est lui qui théorisera sa situation et celle d’Alice. Ainsi que leur rapport réciproque. D’après les réflexions de Mattia, Alice et lui sont deux nombres premiers et pas n’importe lesquels mais deux premiers jumeaux. Exactement 2760889966651 et 2760889966649. Leur destin est donc d’être constamment très proches sans jamais pouvoir se toucher. Il y aura toujours un autre chiffre entre eux deux.
Paolo Giordano a été la révélation de 2008 en Italie. Très jeune, il n’a que 27 ans, il a gagné le prix Strega ainsi que le prix Campiello premier roman. Son livre est d’autant plus étonnant qu’il montre une maturité d’écriture insoupçonnable pour un auteur de son âge. Tout est mathématiquement bien calculé. Les éléments scientifiques et mathématiques sont parfaitement intégrés dans la narration. On ne peut pas s’empêcher de penser au Houellebecq des Particules élémentaires.