Le Pulle, opérette amorale de Emma Dante

Par Stefano Palombari

Le Pulle est la dernière pièce de Emma Dante qui a été co-produite par le Teatro Stabile de Naples, le Théâtre du Rond Point de Paris et le Théâtre National de Bruxelles. Emma Dante a su se faire remarquer comme l'un des auteurs et metteurs en scène parmi les plus intéressants du théâtre expérimental italien. Emma Dante explique que « La définition d'« opérette amorale » dérive de l’absence de rapport avec la morale commune. Le Pulle est un acte unique de caractère populaire où la récitation s’alterne avec le chant. Les prostituées sont les protagonistes de la pièce (pulle en Palermitain), qui marchent loin des voies du Seigneur. »

Palerme est comme un grand musée où la culture côtoie l’ignorance, où le beau et le laid, la richesse et la misère s’entremêlent comme au théâtre. Palerme est le théâtre. Les trottoirs de Palerme sont pour Emma Dante un sujet d’inspiration inépuisable. Depuis toujours cette dramaturge sicilienne s’intéresse aux marges de la société, lesquelles représentent à ses yeux un monde parallèle avec ses habitudes, ses règles et autres conventions. Ainsi, Le Pulle, titre de son nouveau spectacle, sont les trans (ou travestis) qui se prostituent - pulle vient du latin puellae, (filles) et signifie «putains» en palermitain.

Curieusement c’est à Paris, alors qu’elle présentait deux de ses spectacles au Théâtre du Rond-Point qu'Emma Dante a eu l'idée de cette pièce. En se promenant sur les quais de la Seine, sur les Champs-Élysées et dans bien d’autres quartiers de la capitale, elle a ressenti dans l’atmosphère un parfum de sensualité et de lascivité. C’est ce parfum qu’elle a choisi de transposer à sa manière unique dans le petit monde de la prostitution à Palerme sous la forme «opérette amorale». Elle y met en scène des «pulle» qui chantent et dansent en parlant de ce qui serait le plus beau rêve de leur vie. C’est donc une vision haute en couleur et un peu folle où les désirs des unes et des autres se donnent libre cours sauf que la réalité tend à reprendre le dessus et que ces heureux moments ne font pas oublier qu'ils ont aussi leur part d'ombre.