Publié le mardi, 18 novembre 2008 à 11h55
Cinema Miracolo : Une sélection enthousiasmante
Le deuxième Festival du cinéma italien à l'Espace Pierre Cardin nous a offert une sélection de films en compétition dont la qualité d’ensemble a enthousiasmé les spectateurs. On peut regretter que le jury n’ait récompensé que les actrices (Alba Caterina Rohrwacher et Valentina Lodovini) du plus brillant, Riprendimi d'Anna Negri. Cette comédie aussi féroce que subtile sur les rapports de couple, l’irresponsabilité et l’hypocrisie des trentenaires, révèle une cinéaste de première grandeur, surdouée en fait de mise en scène, capable de mêler le mélo et l’hilarant, de faire de l’inédit à partir de clichés, et de se moquer au passage de ses confrères qui croient qu’il faut imiter le néoréalisme pour montrer la société actuelle. Ce dernier propos convient pour décrire Pa-ra-da de Marco Pontecorvo (Prix du public), un film pétri de bons sentiments et censé montrer de façon vériste la vie des enfants sans abri de Bucarest, mais qui ne sort jamais des sentiers battus, pas plus qu’il ne s’écarte du point de vue commode selon lequel il suffit d’un seul homme de bonne volonté pour triompher des pires adversités.
Il dolce e l’amaro d’Andrea Porporati lui est très supérieur : son auteur a eu l’excellente idée de choisir pour narrateur un petit mafieux sicilien qui passe, au fil des années, du culte de la Cosa Nostra au bonheur de mener la vie la plus banale qui soit. La manière dont Porporati montre la mafia sicilienne, à travers son quotidien, en mettant en relief sa stupidité vulgaire, son ridicule, sa cruauté mais aussi l’intensité de la vie criminelle, rend son film plus original et complexe que Gomorra.
Il faut saluer aussi le talent de Francesco Munzi, dont le film Il resto della notte (Prix du jury) part d’une situation convenue – la riche patronne qui soupçonne sa bonne de la voler – pour développer peu à peu un propos toujours plus fin et profond sur les diverses formes de la misère humaine. Munzi montre les immigrés délinquants de façon aussi convaincante que la grande bourgeoisie, traitant ses personnages avec l’attention et l'absence d'idées reçues qui manquent si souvent au cinéma « social ».
Restés sans récompenses, deux autres films nous font souhaiter qu’ils trouvent un distributeur français : Aspettando il sole d’Ago Panini et Lascia perdere, Johnny de Fabrizio Bentivoglio. Le premier long-métrage de Panini s’inspire par moments un peu trop des frères Coen, de Tarantino et d’Altman, mais n’en reste pas moins très inventif sur le plan visuel comme dans son scénario. Sa galerie de personnages plus fous les uns que les autres, réunis dans un hôtel minable au cours d’une nuit où leurs délires vont contaminer jusqu’aux termites qui le rongent, fait beaucoup rire mais aussi réfléchir sur la nature humaine. Dommage qu’une traduction lamentable ait empêché les non-italophones de savourer ses répliques.
Le début de réalisateur de l’excellent acteur qu’est Bentivoglio séduit, quant à lui, par la tendresse chaleureuse avec laquelle sont dépeints ses personnages : un adolescent qui rêve de devenir guitariste, un pianiste et chef d’orchestre sur le retour qui cherche à remonter la pente (joué par Bentivoglio), leur imprésario, véreux mais sympathique, les minables musiciens de province et les petites gens qui les entourent. Lascia perdere, Johnny offre quelques trouvailles dramatiques inoubliables, dont la scène où le protagoniste se fait donner une dernière leçon par son mentor de naguère qui a perdu la raison. S’il manque de vraie originalité, il fait penser qu’à continuer de faire de la mise en scène, son réalisateur pourrait créer une œuvre des plus appréciables.
Le public du festival s’est réjoui de constater que le cinéma italien actuel offre tant de nouveaux talents qui méritent d’être suivis. Nous avons hâte de voir la prochaine sélection.