Publié le dimanche, 7 juin 2009 à 18h45
Totò ou la réalité sans fard
La première scène annonce tout de suite la couleur du film, façon de dire car toutes les créations de Ciprì et Maresco sont en noir et blanc. Dans un cinéma sordide, des hommes laids regardent avec concupiscence une scène de zoophilie aux dépens d’un âne. Paletta est le plus motivé et, une fois le film terminé, il décide à tout prix qu’il doit satisfaire son désir. C’est le premier volet de ce film dur aux accents bibliques qui se termine sur un Golgotha sicilien.
Il y a des scènes dures, mais jamais obscènes, toujours mimées, car toujours symboliques. Ce n’est nullement de la pornographie. Au-delà des passages qui peuvent choquer, il faut lire Totò qui vécut deux fois, comme une allégorie impitoyable et percutante de l’idéologie dominante. Si l’on gratte un peu la dorure moraliste qui recouvre notre société, on se rend compte que Paletta est en très bonne compagnie.
Partout, la communication se fait par clins d’oeil à la sphère sexuelle. La pornographie est un domaine très vendeur, bien que le plus souvent maquillée ou appelée autrement. Le même discours vaut pour les autres thèmes abordés par les deux réalisateurs siciliens dans les trois volets qui composent ce film. La cupidité, sujet principal du deuxième épisode, la religion qui permet de garder des rapports de force ancestraux, la mafia, toujours présente, la trahison… des sujets d’évidente actualité qui devant la caméra de Ciprì et Maresco acquièrent une force esthétique hors pair aux accents pasoliniens.
Il semblerait ne pas y avoir d’espoir dans ce monde où la laideur règne sans partage… Au fait oui, ils le suggèrent par une absence ostentatoire, les femmes. Il n’y a que des hommes dans ce film. Les personnages féminins aussi sont des hommes, des acteurs hommes. Comme pour nous signifier que c’est le seul espoir de s’en sortir. Pour Ciprì et Maresco, la femme est l'avenir de l’homme.